La liberté d’’expression religieuse est de règle

Au sein d’’une entreprise privée, la liberté d’’expression religieuse est de règle

kippa.jpgUn avis de la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité) rendu public le 10 avril vient de rappeler qu’’au sein de l’’entreprise privée, la liberté religieuse est la règle.

Les restrictions apportées à cette liberté par des règlements intérieurs d’’entreprises doivent toujours être « justifiées » et « proportionnées au but recherché ».

Voici la synthèse de cet avis, publiée sur le site internet de la Halde :

« La liberté de religion et de convictions est un principe consacré par le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et par l’’article 9 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l’’Homme, qu’’il s’agisse de la liberté de conscience ou du droit d’’exprimer ses convictions en public ou en privé.

En France, le principe de laïcité impose une stricte neutralité dans la tenue et les expressions aux agents publics dans l’’exercice de leurs fonctions.

A contrario, aucune disposition législative ou réglementaire n’’encadre spécifiquement l’’exercice de la liberté religieuse au sein de l’’entreprise privée, mais la loi et la jurisprudence en précisent certaines limites :

  1.  Les abus du droit d’’expression sont interdits, même en l’’absence de disposition réglementaire interne, et peuvent être sanctionnés par l’’employeur : prosélytisme, actes de pression ou d’’agression à l’’égard d’’autres salariés…

  2. La liberté d’’expression religieuse est la règle, mais l’’employeur peut y apporter des restrictions dans le cadre de son pouvoir de direction défini par les articles L.1121-1 et L.1321-3 du code du travail. La jurisprudence dit qu’’elles peuvent être justifiées :

    •  soit par des impératifs de sécurité au travail, de santé ou d’’hygiène (incompatibilité entre le port d’’un signe religieux et d’’un équipement obligatoire, risques accrus par le port de vêtements non adaptés…)
    •  soit par la nature des tâches à accomplir, notamment lorsque la prestation de travail est en lien avec la clientèle. L’’employeur doit être en mesure de démontrer que ces limitations sont fondées sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et qu’’elles sont proportionnées au regard des tâches concrètes de ses employés et du contexte de leur exécution. Le simple contact avec la clientèle, par exemple, ne suffit pas à justifier une restriction. Non seulement l’’interdiction ne peut être générale et absolue, la légitimité d’une limitation du port de signe religieux s’’appréciant au cas par cas, mais ses modalités doivent pouvoir être discutées avec les salariés intéressés.

  3. Le salarié ne peut invoquer des prescriptions religieuses pour refuser d’’exécuter tout ou partie de ses missions contractuelles ou pour se soustraire aux obligations légales et réglementaires (telles que les visites médicales obligatoires).

    Les revendications liées aux pratiques religieuses (autorisations d’’absence pour les fêtes, aménagements du temps de travail pour les prières et autres pratiques) ne peuvent s’’imposer face aux nécessités du bon fonctionnement de l’’entreprise. Toutefois, une contrainte horaire ou un refus d’’autorisation d’’absence ne sont légitimes que s’’ils sont étrangers à toute considération discriminatoire. »

Cet avis montre bien que le principe qui doit prévaloir dans une entreprise privée est celui de la liberté religieuse, tandis que dans la fonction publique le principe de laïcité impose une « stricte neutralité » aux agents.

Le règlement intérieur d’’une entreprise ne peut pas interdire, de manière générale et absolue, le port de tout signe religieux ostentatoire.

La liberté d’’expression doit prévaloir. On est donc très loin de l’’attitude d’’un Jean-Pierre Brard qui, lorsqu’’il était maire de Montreuil, avait refusé de laisser s’’exprimer une élue au motif qu’’elle portait un pendentif avec une croix. Le tribunal correctionnel de Bobigny l’’avait condamné à 1500 euros d’’amende et 5000 euros de dommages et intérêts.

Le juge avait considéré que le député avait fait « une confusion entre le principe de neutralité exigé dans les services publics et la non-neutralité d’’un conseil municipal où tout le monde doit pouvoir s’’exprimer ». (voir notre article)

Porter un vêtement ou un insigne manifestant une appartenance religieuse ne constitue pas en soi un acte de prosélytisme. La CEDH (Cour européenne des droits de l’’homme) a ainsi rappelé que le port du foulard pour les femmes en islam, de la kippa ou du turban pour les hommes de confession juive ou sikhe « relève d’’abord de l’’accomplissement d’’une pratique religieuse ».

A la liberté de religion s’’ajoute la liberté d’’expression. Les seules restrictions à cette liberté d’’expression religieuse qui pourront être apportées par l’’employeur devront être « justifiées par la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ».

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