Quand un député s’’oppose à la diffusion des idées

Quand un député s

La diffusion des idées est une liberté fondamentale, garantie par de nombreux textes de loi, dont l’’article 19 de la déclaration universelle des droits de l’’homme qui dispose :

« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. »

Pour le député Jean Grellier, certaines idées, par exemple une dénonciation des abus de la psychiatrie, même répandues de manière parfaitement licite, ne sont pas recevables lorsqu’’elles émanent d’un mouvement qualifié de « secte » dans un rapport parlementaire !

On sait ce qu’’il en est de la teneur de ce rapport. Une vingtaine d’’heures d’audition, sans aucune volonté d’’équilibre des points de vue, sans aucune convocation des vrais experts du sujet, qu’’ils soient historiens ou sociologues des religions, ont suffi à une poignée de parlementaires pour, à partir d’un rapport bâclé des RG, dresser une liste de 173 mouvements spirituels et religieux qualifiés de « secte ».

Un rapport qui avait suscité le tollé de la communauté scientifique et des réactions virulentes d’’associations internationales de défense des droits de l’’homme. Un rapport à chaque fois invalidé par les tribunaux lorsqu’’il a servi à justifier des discriminations. Bref un rapport qui n’’a, heureusement, aucune valeur juridique.

Voici donc la question écrite du député Jean Grellier et la réponse éclairante de la Ministre de l’’intérieur.

Ministère interrogé : Relations avec le Parlement
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 12/02/2008 page : 1117. Réponse publiée au JO le : 20/05/2008 page : 4230. Rubrique : Esotérisme. Tête d’analyse : sectes. Analyse : lutte et prévention.

Texte de la QUESTION :

M. Jean Grellier alerte M. le secrétaire d’’Etat chargé des relations avec le Parlement sur les publications récemment reçues par les parlementaires relatives à la psychiatrie. Il y a quelques semaines, une brochure luxueuse, agrémentée de surcroît d’’un DVD édifiant quant au diagnostic sur les « mérites » de la pratique de la psychiatrie, était transmise à tous les députés. Lecture faite des mentions légales de ce document, il apparaît qu’’il émane de l’’Eglise de Scientologie. Selon le rapport parlementaire n° 2468, l’’Eglise de Scientologie est identifiée de manière indéniable comme un mouvement sectaire. Les sectes peuvent donc librement faire oeœuvre de prosélytisme jusque dans nos institutions où les principes de laïcité et de rationalisme éclairé conditionnent nos principes républicains. Il lui demande donc de bien vouloir lui expliquer sa position quant à ce qui semble être pour le moins un paradoxe extrêmement gênant.

Texte de la RÉPONSE :

Le droit positif ignore la notion de secte à laquelle n’’est attachée aucune conséquence juridique. Cette absence de définition résulte de la conception française de la laïcité, qui trouve son fondement dans l’’article 10 de la Déclaration des droits de l’’homme et du citoyen disposant que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble par l’’ordre public institué par la loi », et qui pose ainsi clairement le principe de la neutralité de l’’Etat à l’égard des opinions religieuses. C’est pourquoi tout courant de pensée peut librement s’’exprimer, tant qu’’il agit dans le cadre de la loi. Néanmoins, si la République assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes, elle réprime les dérives constatées dans certains groupements qui peuvent, en l’’état actuel de notre droit, tomber d’’ores et déjà sous le coup de multiples qualifications pénales. L’’intitulé de la « mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires » créée par décret le 28 novembre 2002 résume la conception des pouvoirs publics en la matière ; cette même conception a sous-tendu l’’élaboration de la loi n°2001-504 du 12 juin 2001 visant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l’’homme et aux libertés fondamentales.

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